Mithra lance un contraceptif révolutionnaire, l’Estetrol

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L’entreprise pharmaceutique liégeoise Mithra annonce la commercialisation prochaine de l’Estetrol, un médicament pour traiter la ménopause sans risquer la thrombose. Et qui servira aussi, au passage, de contraceptif oral. Le CEO François Fornieri annonce une révolution en la matière.

“En 2001, une étude américaine démontrait que les traitements de la ménopause avaient un impact négatif sur la coagulation, avec des risques de thrombose, rappelle François Fornieri, CEO de Mithra à Liège. Cette annonce avait alors provoqué un véritable séisme sur le marché tant on s’accordait jusque-là à affirmer tout le contraire. En peu de temps, le chiffre d’affaires du secteur pharma pour ce type de produits était passé de 5 à 2 milliards de dollars. Depuis, le marché a repris du poil de la bête, notamment grâce aux patches et aux applications transdermiques, tandis que la demande reste potentiellement très forte pour autant qu’il existe une réelle garantie de sécurité face aux risques thromboemboliques. A ce niveau, le potentiel de chiffre d’affaires est de l’ordre de 8 milliards de dollars.” Si François Fornieri revient sur ce constat, c’est que son entreprise s’active à mettre prochainement sur le marché un médicament répondant à ces attentes : l’Estetrol. “L’Estetrol sera demain aux oestrogènes ce que l’aspirine a été jadis aux anti-inflammatoires !”, lance-t-il, certain de l’engouement que ce médicament générera à l’échelle mondiale.

Le retour au bercail d’Uteron

“L’Estetrol est en fait un oestrogène naturel produit par le foetus, explique-t-on chez Mithra. Il n’y en a que dans l’espèce humaine. Sa reproduction chimique est très coûteuse, mais plus les phases de R&D progressent, plus ce coût diminue.” En 2013, le financement en R&D était cependant devenu hors budget pour Uteron Pharma. Les associés d’alors de François Fornieri se montraient de surcroît plus soucieux d’encaisser une plantureuse plus-value que d’investir dans l’Estetrol. Du coup, les Américains de Watson ont décidé de reprendre l’affaire et se sont engagés à poursuivre le développement des projets en maintenant les activités en périphérie liégeoise – condition sine qua non imposée par François Fornieri. Reste que Watson était à son tour embarqué dans une phase de consolidation. Et le nouvel actionnaire de référence, Actavis, amené à faire des choix entre les différents projets à développer… Ceux d’Uteron Pharma sont finalement passés à la trappe, avec le déclenchement d’une phase Renault à Flémalle. C’est à ce moment que François Fornieri est monté au créneau pour rappeler une clause de sauvegarde signée lorsqu’il avait cédé Uteron Pharma à Watson : Mithra pouvait effectivement récupérer quatre des activités d’Uteron si Watson s’en désintéressait, ce que l’entité liégeoise ne s’est pas privée de faire et ce pour 1 euro symbolique, alors que la valeur des ces projets tourne aujourd’hui aux alentours de 150 millions ! Derrière l’euro symbolique se cache toutefois la reprise d’un passif et l’engagement de poursuite des phases de R&D. François Fornieri affiche une détermination à toute épreuve : “Entre la cession en 2013 et la reprise aujourd’hui, les moyens mis sur la table par les Américains ont permis de produire l’Estetrol en sept étapes contre 12 auparavant. Et bientôt, quatre ou cinq étapes à peine suffiront !”.

L’engouement de François Fornieri s’explique aussi par le fait que l’Estetrol sera commercialisé comme moyen contraceptif. “La phase 2 de la R&D a montré que l’Estertol bloque effectivement bien l’ovulation, assure François Fornieri. Nous lançons la phase 3 de R&D à l’échelle mondiale. Concrètement, il s’agit de tester cette pilule sur 30.000 cycles dans un premier temps, 20.000 au stade final. Jusqu’ici, tout laisse vraiment à penser qu’il n’y a aucun impact sur le foie où sont produits les facteurs de coagulation. Le potentiel est en effet énorme car autant, depuis 2011, les pilules de 3e génération ont pu tétaniser gynécologues, médecins et patientes, autant l’Estetrol va révolutionner le marché. Elle réduit à néant tant les risques de thrombose que les désagréments liés aux pilules de seconde génération – comme l’acné ou la pilosité dérangeante – qui, depuis 2011, avaient connu un certain retour en grâce !”.

Levée de fonds et entrée en bourse

Avec l’Estretrol, François Fornieri veut donc faire de Mithra un acteur incontournable sur le marché du contraceptif oral et du traitement de la ménopause. Pour se donner les moyens de ses ambitions, l’ex-Manager de l’année de Trends-Tendances est en train de finaliser la mise en place d’une levée de fonds à hauteur de 70 millions d’euros. A cette fin, outre l’entrée dans le capital de l’un ou l’autre géant de la pharma – pour faciliter la distribution à l’échelle mondiale – et de quelques investisseurs privés, un dossier d’introduction en Bourse sera déposé à l’Autorité des services et marchés financiers (en abrégé FSMA) d’ici le 6 mars prochain. François Fornieri se veut toutefois prudent : “Il faut voir quelle sera la santé du marché d’ici juin, date programmée pour l’entrée en Bourse. Si elle n’est pas optimale, d’autres pistes de financement pourraient alors être activées”, avoue-t-il. Quant aux revenus engendrés par l’Esterol, une fois celui-ci mis sur le marché, François Fornieri nous assure qu’ils serviront prioritairement à financer d’autres recherches prometteuses, toujours en région liégeoise.

Jean-Marc Damry

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