Le financement, clé de la réussite d’une entreprise

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Pour vivre, une entreprise doit investir et donc se financer. Le financement fait ainsi partie intégrante de sa stratégie. Cela est d’autant plus vrai pour les entreprises familiales qui ne peuvent multiplier les projets et doivent soigneusement penser le financement de chaque investissement.

“Financer une entreprise sur le long terme nécessite une vision et une réflexion prospective sur son avenir “, entame Eric Bastin, senior manager chez BDO. Le parallèle avec les investissements est évidemment patent et même flagrant dans le chef des entreprises familiales. Chaque projet doit ainsi être examiné dans le contexte propre de l’entreprise, tout comme le financement ad hoc. Il n’existe en effet pas de formule miracle, ” chaque financement doit être étudié et placé dans son contexte d’utilisation “. Il convient ainsi de respecter quelques grands principes :

– Financer un investissement à long terme avec des fonds de long terme

– Payer un prix juste en fonction du risque, de votre stratégie et de votre liberté de décision

– Moins un financement sera garanti aux yeux du débiteur, plus il sera cher.

Des financements pour chaque étape

Il est également nécessaire de tenir compte de la maturité de l’entreprise. Une banque rechignera, par exemple, à accorder un crédit à une jeune société toujours en phase de développement de produits. Habituellement, on identifie plusieurs phases de la vie d’une entreprise et on y fait correspondre les sources de financement les plus adaptées.

” A chaque stade de développement, la combinaison de plusieurs sources de financement demeure souhaitable afin de sécuriser les ressources de capitaux et d’en garder le coût sous contrôle “, pointe Eric Bastin.

L’augmentation de capital

” Avant tout projet d’investissement, il est important d’évaluer les moyens propres de l’entreprise et le montant que ses actionnaires sont prêts à investir “, épingle Eric Bastin. Les actionnaires peuvent injecter des fonds supplémentaires ou réduire les dividendes afin de permettre à l’entreprise de mettre davantage de bénéfices en réserve.

L’expert de BDO souligne à ce titre que la proportion de fonds propres dans un financement de long terme est en moyenne de l’ordre de 30%… même si cela peut varier en fonction du projet, du secteur et de l’entreprise.

Si les capitaux disponibles de l’entreprise s’avèrent insuffisants, ” il convient d’envisager une augmentation de capital, c’est-à-dire une émission de nouvelles actions “, poursuit Evelyne Heyvaert, investment director chez ING. Ces capitaux frais peuvent être apportés par diverses parties : les actionnaires existants, des partenaires industriels ou le marché boursier. Le private equity constitue une autre alternative.

” Les investisseurs en private equity investissent dans des entreprises non cotées (ce que désigne le terme private) dotées d’une équipe de management forte et disposant d’opportunités de croissance internes ou externes. Ces entreprises peuvent être actives dans des secteurs de pointe mais également dans des secteurs très traditionnels. Ainsi, une stratégie de croissance par acquisition peut s’avérer très attrayante dans un secteur mature mais peu concentré. En rachetant plusieurs petits concurrents, l’entreprise peut atteindre une taille lui permettant de réaliser des économies d’échelle et ainsi devenir plus compétitive. Ensuite, lorsqu’une entreprise a conquis une position dominante sur le marché local, la croissance peut se poursuivre à l’étranger et/ou sur de nouveaux marchés adjacents. On parle alors d’une stratégie de buy-and-build. ”

Lorsque vous cherchez à faire intervenir des investisseurs tiers dans votre structure de financement, assurez-vous que vous partagez la même vision sur le projet et le futur de votre association. ” Eric Bastin (BDO)

Les points d’attention

” Lorsque vous cherchez à faire intervenir des investisseurs tiers dans votre structure de financement, assurez-vous que vous partagez la même vision sur le projet et le futur de votre association, insiste Eric Bastin. Ne vous focalisez pas uniquement sur le montant investi mais aussi sur le réseau, les compétences, les synergies que cet investisseur vous apporte, c’est ce que l’on appelle le smart money. ”

Exemple

Votre société Y souhaite racheter la société concurrente X pour 1.000.000 euros. Votre volonté étant de maintenir un ratio de solvabilité sain supérieur à 30 %, vous devrez investir 300.000 euros en fonds propres. Vous et votre frère, actionnaire à 50/50 de l’entreprise, avez décidé de vous adresser à un groupe d’investisseurs professionnels.

Votre entreprise a été valorisée d’un commun accord à 1.500.000 euros. C’est ce que l’on appelle la valeur pre-money, c’est-à-dire avant l’augmentation de capital et l’acquisition de X.

A la suite de l’augmentation de capital de 300.000 euros en numéraire, vous et votre frère verrez votre participation passer de 50 à 41,7 %. Les investisseurs recevront le solde de 16,6 % en échange de leur apport.

Le quasi-capital

” Il n’y a pas de définition légale de la notion de quasi-capital, précise Eric Bastin. Globalement, elle désigne un ensemble de ressources financières qui n’ont pas la nature comptable de fonds propres en comptabilité belge mais en possèdent certaines caractéristiques (stabilité, conversion potentielle en fonds propres, formule rémunération). Parmi les instruments les plus courants, on retrouve les emprunts subordonnés, les obligations (convertibles ou non), les emprunts mezzanines, les emprunts participatifs ou les comptes courants d’associés. ”

Le principal intérêt de ce mode de financement est le caractère subordonné de son exigibilité. ” Le remboursement de ce financement est ‘subordonné’ au remboursement préalable de la dette bancaire, ce qui rassure votre banquier. Dans sa forme la plus simple d’emprunt subordonné ou obligataire, il permet par ailleurs d’éviter une dilution de l’actionnariat. ”

En termes de coûts, ” la rémunération offerte tient compte d’une prime de risque rendant ce mode de financement plus onéreux qu’un crédit bancaire. Cela n’entame toutefois pas le succès du quasi-capital. On rencontre ainsi régulièrement ce type d’emprunts subordonnés dans le cadre du financement d’opérations de LBO ou MBO. Un crédit-vendeur ( vendor loan) peut d’ailleurs être considéré comme du quasi-capital à condition d’en subordonner strictement le remboursement “.

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Les points d’attention

Eric Bastin de BDO épingle plusieurs éléments à tenir à l’oeil au moment d’envisager une levée de quasi-capital :

– le fait d’offrir la convertibilité de la dette permet de réduire le taux d’intérêt mais avec le risque d’une dilution de l’actionnariat ;

– pour les entreprises présentant une solvabilité importante, le recours au quasi-capital peut être préférable à l’augmentation de capital afin d’éviter la dilution ;

– les financements participatifs de type crowdlending font partie de cette catégorie du quasi-capital.

Exemple

En plus des 300.000 euros d’augmentation de capital, vous souhaitez consolider votre structure financière lors du rachat X par 100.000 euros de quasi-capital. Vous proposez aux investisseurs de consentir un prêt subordonné de 50.000 euros qui ne pourra commencer à être remboursé qu’après apurement de la dette bancaire. Pour ce risque, les investisseurs exigeront un taux d’intérêt annuel de l’ordre de 6 %. De votre côté, vous subordonnez 50.000 euros du solde créditeur de votre compte-courant suivant les mêmes conditions.

Une variante aurait été de négocier avec le cédant de la société X un crédit-vendeur de 100.000 euros qui présenterait les mêmes caractéristiques de remboursement.

Dettes bancaires

” Le premier organe de financement à long terme d’une entreprise mature reste le secteur bancaire, selon Eric Bastin. La banque propose plusieurs types de prêts suivant l’objet à financer : crédits d’investissement, crédits roll over, leasings mobiliers et immobiliers. ”

” Ces financements bancaires sont dits ‘seniors’, le remboursement du principal et des intérêts étant prioritaire par rapport à d’autres dettes au sens large. En cas de difficultés financières, leur remboursement intervient ainsi avant des dettes juniors (dettes subordonnées, quasi-capital) et le capital des actionnaires.

Cette notion prend une réelle importance dans la structuration des financements des dossiers de rachats d’actions (LBO, MBO, etc.). En effet, cette démarche consiste souvent à construire un endettement en superposant des couches de dettes. ”

Exemple

Une fois que vous avez bouclé votre structure de financement de haut de bilan (fonds propres, quasi-capital), la banque finance le solde de 600.000 euros sur sept ans maximum (durée habituelle pour un rachat).

Même si les garanties sont importantes, la banque analyse en priorité la capacité de remboursement de sa créance. Le comité de crédit sera d’autant plus rassuré si le prêt peut être remboursé en théorie uniquement grâce aux cash-flows de la société X rachetée.

Votre entreprise est ainsi parvenue à racheter la société X en utilisant que 50.000 euros de sa trésorerie (la conversion de votre compte courant). Quant à vous, en tant qu’actionnaire, vous devez consentir à céder 16,60 % à des investisseurs tiers.

Les “buy-out” (MBO, MBI, LBO)

” Le terme technique utilisé dans le monde financier désignant un rachat d’entreprise est buy-out, entame Evelyne Heyvaert. Dans le cadre d’un buy-out, une nouvelle société (Newco) est souvent créée spécialement pour la transaction et achète le groupe ou l’entreprise. Pour financer l’achat, Newco recourt à des fonds propres et des dettes. La terminologie spécifique permet de catégoriser les buy-out en fonction du type d’acheteurs et de la structure financière de la transaction. ”

Dans le cadre d’un management buy-out (MBO), l’équipe de management est le principal moteur de l’opération. Elle participe activement aux discussions avec les vendeurs, éventuellement en partenariat avec des investisseurs externes. En fonction de son apport financier et de la valeur de la cible, le management obtiendra une participation majoritaire ou minoritaire dans le capital de Newco.

Lors d’un management buy-in (MBI), une équipe externe sera aux commandes de la cible après l’opération. Cette équipe, en général restreinte, est souvent composée de dirigeants qui disposent d’une grande expérience dans l’industrie cible. Elle peut être à l’origine de l’opération, ou être contactée par des investisseurs en private equity. La structure transactionnelle d’un MBI est comparable avec celle d’un MBO. L’opération comporte toutefois plus de risques car l’équipe de management qui reprend les rênes de l’entreprise est nouvelle.

Un leveraged buy-out (LBO) est un buy-out financé par un endettement. Dans de telles transactions les investisseurs en private equity jouent un rôle essentiel lors des négociations avec les vendeurs et les pourvoyeurs de dettes afin d’optimiser la structure financière. Plus la dette est importante, plus le management – qui dispose souvent de moyens financiers limités – pourra obtenir un pourcentage de parts important. Il faut néanmoins rester attentif à ne pas trop endetter la société afin de ne pas devoir restreindre les investissements dans la croissance future.

Evelyne Heyvaert souligne que les buy-out peuvent répondre à plusieurs problématiques au sein des entreprises comme l’absence de successeur au sein de sociétés familiales, la volonté d’actionnaires de diversifier leur patrimoine en cédant une partie de leurs parts ou la sortie d’un investisseur financier déjà présent au capital.

Les entreprises familiales vitales pour notre économie

Trois quarts des sociétés belges sont des entreprises familiales. Elles comptent pour un tiers de notre PIB et 45 % de l’emploi. C’est pourquoi Trends-Tendances souhaite leur accorder encore plus d’attention. Et ce via différents canaux de communication.

Chaque mois, votre magazine publie un dossier sur une thématique propre aux entreprises familiales, tandis que Canal Z dresse le portrait d’entreprises familiales originales. Vous pouvez par ailleurs retrouver toute l’information liée à l’entrepreneuriat familial sur www.tendances.be/familybusiness. Et, last but not least, notre newsletter mensuelle Trends Family Business vient compléter l’offre d’information sur le sujet.

Trends Family Business, un projet 360 ° décliné grâce au soutien de BDO et ING.

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