Storme: cinq générations aux arômes mouscronnois

Storme transforme actuellement une partie de ses bureaux en un véritable centre dédié au café où les visiteurs et les clients pourront déguster les différents cafés. © dr

Depuis cinq générations, l’entreprise de torréfaction de café Storme est active à Mouscron. En 120 ans, elle a connu une histoire mouvementée et même failli disparaître à la fin des années 1980. Elle est aujourd’hui en pleine forme et entend bien rebondir sur le regain d’intérêt pour les cafés de qualité.

L’histoire de l’entreprise familiale Storme débute à la fin du 19e siècle quand l’arrière-grand-père de Jean-François Storme, qui dirige la société aujourd’hui, reprend une épicerie au coeur de Mouscron.

“Il s’appelait Hector, c’était un fils de meunier et l’épicerie se nommait ‘Au lion d’or’, rappelle-t-il. Elle torréfiait également du café, ce qui était assez courant à l’époque. Assez rapidement, il délaisse le commerce de détail pour le métier de grossiste. Il livre alors des produits alimentaires dans la région tout en poursuivant la torréfaction. Ses trois fils – Louis, Gaston et Omer – le rejoignent après la Première Guerre mondiale. Mon grand-père, Omer, décédera jeune dans un accident de voiture et ce sont ses deux frères qui vont développer l’entreprise.”

Dans les années 1950, les trois petits-fils entrent à leur tour dans la société : Jean, le père de Jean-François, Jacques, le fils de Gaston, et Francis, le fils de Louis. “Il y avait une règle à l’époque au sein de la famille : un seul membre de chaque branche intégrait l’entreprise et il n’y avait pas de femme. Aujourd’hui, elle n’est plus de mise”, sourit Jean-François Storme.

De la torréfaction à la distribution

Storme: cinq générations aux arômes mouscronnois
© dr

C’est également dans les années 1950 que Storme rejoint la chaîne Végé présente en Flandre-Occidentale et dans le Hainaut. En 1952, elle est scindée en Storme Frères, active dans la distribution alimentaire, et Cafés Storme. La seconde demeurera au coeur de Mouscron avec la torréfaction au passage Saint-Pierre alors que la première déménage ses entrepôts à Luingne dans les années 1960. C’est à cette époque que la famille se lance dans la distribution avec des discounts alimentaires en gestion propre baptisés Codi.

“Les petites épiceries ont commencé à souffrir et les cousins se sont adaptés à cette évolution, enchaîne Jean-François Storme. Parallèlement, le discount alimentaire a émergé. Ce que nous proposions alors ressemblait à ce que faisait Colruyt : des prix agressifs dans des magasins relativement basiques. Nous avons lancé cette chaîne en 1968 et elle a connu un essor rapide.”

Jean et Jacques vont alors se consacrer pleinement à son expansion. Les magasins vont s’étoffer et s’agrandir, passant de 300 à 1.000 m2.

Au début des années 1980, Codi compte quelque 80 supermarchés, emploie 400 personnes et réalise un chiffre d’affaires de 4 milliards de francs belges (100 millions d’euros). Francis, quant à lui, s’occupe exclusivement de la torréfaction qui se développe de concert avec la distribution puisque celle-ci devient le principal, voire l’unique, canal de vente de ses paquets de café. Mais corollaire de ce rapide développement, un besoin croissant de financement. “Je me rappelle que mon père avait dû hypothéquer sa maison”, souligne Jean-François Storme.

Début des années 1980, le groupe néerlandais Edah qui souhaite s’implanter en Belgique approche la famille qui finit par lui céder la chaîne de magasins en 1984. Mais le style et les produits néerlandais ne vont pas du tout coller au goût du consommateur belge et l’enseigne va rapidement péricliter. Les magasins seront progressivement repris par Colruyt. Ne reste plus alors que les Cafés Storme que gère Francis, qui rachète en 1984 les parts de ses deux cousins, et se retrouve seul à la tête de l’entreprise… qui fera faillite quatre ans plus tard.

Relance de l’activité

En 1988, Jean et son fils reprennent l’entreprise. Le premier a 58 ans et le second 28. “J’avais effectué des études de droit à Louvain dans le but d’intégrer l’entreprise familiale mais lorsque je suis arrivé, mon père et ses cousins avaient décidé de la vendre, explique Jean-François Storme. J’ai été le dernier Storme à travailler au sein du groupe néerlandais. J’ai ensuite rejoint la compagnie d’assurances Zurich où je gagnais très bien ma vie. Quand mon père m’a demandé de le rejoindre, j’ai pris la décision, soutenu par mon épouse, de quitter un bon poste pour devenir indépendant.”

Une décision qu’il ne regrette pas. Mais si le nom Storme est indissociable du café, ni Jean-François ni son père n’y connaissaient grand-chose quand ils décident de relancer l’activité. C’est donc avec l’aide de la famille anversoise Beyens qu’ils se lancent dans l’aventure, Karel Beyens prenant 50 % de l’affaire. “Il nous a bien aidés et appris le métier, reconnaît l’entrepreneur. Cela a été un excellent partenariat.” En 1996, ils reprennent ses parts et se retrouvent seuls aux commandes.

Dans les années 2000, le marché avait considérablement évolué et n’était plus celui qu’avait connu Francis. Storme s’est donc adaptée. Présente dans l’horeca et la distribution dans un rayon d’une cinquantaine de kilomètres autour de Mouscron, elle s’est lancée à la conquête des entreprises auxquelles elle propose, outre sa gamme de cafés, un assortiment ciblé de divers produits (boissons, snacks, serviettes, vaisselle, etc.).

Depuis septembre 2000, elle est implantée dans de nouveaux bâtiments au zoning industriel de Mouscron. En novembre 2011, la cinquième génération entre dans l’entreprise avec l’arrivée de François Storme qui s’inscrit pleinement dans la stratégie axée sur les entreprises. “Nous proposons aux sociétés un service complet, explique-t-il. Non seulement des cafés, mais également une gamme de machines et leur entretien.”

Le café au goût du jour

Le café est depuis des années à nouveau à la mode. “Surtout le bon café, insiste François Storme. Nous pouvons dire merci à Nespresso et Georges Clooney qui l’ont remis au goût du jour. Ils ont fait découvrir au consommateur la diversité des cafés qui existent. Ce n’est pas seulement de l’arabica ou du robusta. On assiste même dans les grandes villes à un regain pour le café haut de gamme.”

François Storme : Nous pouvons dire merci à Nespresso et Georges Clooney qui ont remis le café au goût du jour. Ils ont fait découvrir au consommateur la diversité des cafés qui existent.
François Storme : Nous pouvons dire merci à Nespresso et Georges Clooney qui ont remis le café au goût du jour. Ils ont fait découvrir au consommateur la diversité des cafés qui existent.© dr

Aujourd’hui pleinement plongé dans la torréfaction, François Storme (32 ans) n’a pas immédiatement rejoint la société familiale. Après avoir décroché son diplôme à l’Ichec en 2009, un master en management international, il a d’abord effectué un crochet de six mois par Aston Carter où il a officié comme chasseur de têtes avant de travailler un an et demi à Gullegem chez LVD, leader dans la conception et la fabrication de machines de pointe dans le travail de la tôle. Il n’est pas le seul membre de la famille présent puisque sa soeur Sophie (26 ans) y travaille à mi-temps, et son frère Nicolas (24 ans) qui exerce ses talents chez Deloitte vient de temps en temps pousser le bout de son nez. “Il a envie de rentrer, reprend Jean-François Storme. Et il s’implique déjà un peu dans l’entreprise. La porte est grande ouverte mais il faut lui trouver une place.”

Storme transforme actuellement une partie de ses bureaux en un véritable centre dédié au café où les visiteurs et les clients pourront déguster les différents cafés. “Nous aurons également une petite torréfaction d’une quinzaine de kilos, ajoute François Storme. L’idée est de présenter dans un espace agréable nos différents produits et machines.”

Ce centre permet également de donner un coup de neuf à cette entreprise plus que centenaire qui, avec l’arrivée de la nouvelle génération, semble bien repartie pour se développer dans le futur. “En privilégiant la qualité davantage que la quantité”, précisent dans la foulée Jean-François et François Storme qui ont déjà intégré la sixième génération en donnant à un de leur crû de café en grains le nom de Vittorio, clin d’oeil au petit

Victor, le fils de Sophie. La relève est assurée.

Guy Van den Noortgate

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content