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La guerre mondiale des armes de distraction massive

L’avantage d’une semaine de congé comme la semaine de Carnaval, comme d’ailleurs toutes les périodes de pause, c’est la possibilité de prendre du recul sur soi et sur le monde qui nous entoure.

J’ai par exemple été frappé par un article rédigé par Hugues de Jouvenel, un prospectiviste français, qui nous alerte sur ce qu’il appelle “le coût de notre distraction”. En fait, il essaie de donner une réponse simple à une question à laquelle les économistes n’arrivent pas à donner une réponse satisfaisante: comment se fait-il que dans une période comme la nôtre, où chaque jour on entend parler de nouveautés technologiques, d’intelligence artificielle, etc., on assiste à un ralentissement des gains de productivité dans les pays industrialisés ? En clair, on a plus de technologie à notre disposition qu’auparavant, mais nous sommes un peu moins productifs. C’est ce qu’on appelle un paradoxe !

Hugues de Jouvenel a eu la lumineuse idée de faire appel à son bon sens. Et si c’était la faute de notre smartphone ? Ou plus précisément, au temps qui est ‘distrait’ par notre smartphone et les autres écrans. D’ailleurs, Hugues de Jouvenel cite plusieurs études qui montrent qu’aux États-Unis, on consulte son smartphone 150 fois par jour. Et encore, cette étude date de 2013… Cela doit être pire aujourd’hui. En France, la dernière étude en date montre que le Français consacre en moyenne 2,3 heures par jour à son écran de smartphone.

Évidemment, il n’y a pas d’étude chiffrée qui montre la part exacte de temps de travail qui est amputée par ces réflexes pavloviens liés à notre smartphone. Les employeurs américains estiment que c’est une heure de travail qui est perdue chaque jour. Mais est-ce bien vrai ? N’oublient-ils pas non plus les consultations professionnelles de notre smartphone en dehors des heures de bureau ?

Notre attention est devenue une ressource rare, et les géants du Net se battent chaque seconde pour la capter

Mais si je vous en parle, c’est pour une autre raison. L’économie d’aujourd’hui est une économie de l’attention. Celle-ci est en effet devenue le bien le plus précieux. Avant, l’économie était une économie de la production, et il fallait gérer des ressources rares comme l’énergie, les matières premières et le travail. Aujourd’hui, la ressource rare n’est plus localisée du côté de la production, mais de la réception. En clair, c’est notre attention qui est devenue une ressource rare. Et Google, Facebook, Amazon et les autres géants d’Internet se battent chaque seconde pour la capter.

On peut s’en plaindre en disant qu’avec toute cette sursollicitation, nous formons sans le savoir toute une génération avec un déficit attentionnel pathologique. On peut se plaindre de ces armes de distraction massive que sont les Facebook et autre Apple. Mais certains experts sont plus positifs et pensent que nous ne sommes pas condamnés à une dissipation abrutissante. En fait, il faut apprendre à avoir une écologie de l’attention. De la même manière que nous avons appris à ne plus manger n’importe quoi, nous devons apprendre à rediriger notre attention, à savoir à quoi il faut accorder de l’attention. Bref, nous devons renoncer à une suroccupation qui nous écrase et choisir une écologie de l’attention. C’est nouveau pour vous et pour moi et c’est une preuve supplémentaire que le monde change… Il faudra s’y adapter plutôt que de le combattre.

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