Namur, capitale et capiteuse

© DEBBY TERMONIA

En province de Namur, c’est la ville éponyme qui est la plus prisée. Son vaste territoire se targue d’abriter une variété de quartiers. Dont certains, comme Erpent, s’arrachent à prix d’or.

Difficile de déterminer avec précision quelle est la commune où la valeur de la brique est à son paroxysme en province de Namur. Mais un trio a assurément la cote, à savoir Gembloux, La Bruyère et Namur-Ville. Des communes qui se suivent aussi sur le plan géographique, alignées le long de la E411 reliant Bruxelles au sud du pays. C’est d’ailleurs leur proximité immédiate de l’axe autoroutier qui leur vaut une large frange de leur succès. ” Toutes les trois profitent du recul des Bruxellois, qui s’enfoncent toujours plus loin de la capitale en quête d’une maison quatre façades avec jardin “, souligne le notaire namurois Valentine Demblon.

Premier centre urbain d’importance après le Brabant wallon, Gembloux jouit de nombreuses facilités – gare, commerces, écoles, services, etc. – et a la particularité de compter de multiples promotions immobilières qui alimentent un parc déjà riche en immeubles à appartements récents. Et pour cause, il faut bien loger l’afflux continu de population qui se déverse sur la commune. D’après l’Institut wallon de l’évaluation, de la prospective et de la statistique (IWEPS), celle-ci a en effet vu sa population augmenter de plus de 25 % ces 20 dernières années. ” On peut dire de Gembloux qu’elle est une petite ville, ponctue Valentine Demblon. Mais sans comparaison aucune avec l’envergure de Namur. ” La Bruyère, plus rurale, a, elle, le statut de village. Et collectionne les coquettes quatre façades et leurs confortables terrains, d’où ses statistiques de prix élevées. D’autant que son avantage géographique est double : la commune fait le lien entre Gembloux et Namur et se situe au croisement de la E411 et de la E42 reliant Liège au Hainaut.

Etendue et disparate

Un atout que La Bruyère partage avec Namur-Ville. Car, en termes de situation, c’est bien la capitale de la Wallonie qui est la mieux lotie. ” Namur bénéficie d’une position géographique exceptionnelle, pointe Paul de Sauvage, patron de la société de promotion namuroise Actibel. Carrefour autoroutier mais aussi ferroviaire, elle distribue Liège, Mons, Bruxelles et le Luxembourg. Elle est quasiment au centre de la Belgique et se targue également d’une situation européenne enviable. Sans compter qu’elle est traversée par deux fleuves, la Meuse et la Sambre. C’est un endroit privilégié. ”

Mais, surtout, Namur est… étendue. ” Elle est la sixième commune la plus vaste du pays, relate Arnaud Gavroy (Ecolo), échevin namurois de l’Aménagement du territoire. Depuis la fusion des communes, elle regroupe 26 anciennes entités. Sa superficie est même supérieure à celle de la Région de Bruxelles-Capitale (175,7 km2 contre 161,4 pour Bruxelles, Ndlr) ! ” Résultat, autour du centre-ville namurois gravitent des quartiers plus au moins retirés et plus ou moins… urbanisés, certains prenant même des airs de campagne, forts d’une importante concentration d’espaces verts et de terres de cultures. ” Qui veut vivre en banlieue verte a de quoi trouver son bonheur dans le périmètre même de la ville de Namur, renchérit l’échevin. C’est assez rare pour être souligné. ”

Rien d’étonnant, dès lors, à ce que ce soit Namur qui emporte le titre de commune la plus chère et la plus prisée de la province, quoique les moyennes de prix des notaires n’abondent pas tous les ans en ce sens. De fait, les disparités sur son territoire sont telles qu’il faut se pencher sur certaines de ses entités pour y dénicher les prix les plus hauts du périmètre provincial. Prix qui gonflent les statistiques namuroises quand les ventes de biens y sont nombreuses, année(s) record à la clé.

Anciens favoris

En la matière, c’est Wépion, plantée le long de la Meuse, à 5 kilomètres au sud du centre-ville namurois, qui a longtemps décroché la palme. Parsemée de maisons quatre façades cossues construites sur de grands terrains (20 à 25 ares) dans les années 1990 à 2000, l’ancienne banlieue chic de Namur pèche aujourd’hui par l’encombrement de sa principale et quasi unique voie d’accès au coeur de la capitale wallonne, engluée dans le trafic aux heures de pointe. Et que dire de la distance qui sépare Wépion de la E411, qu’il faut aller chercher bien loin, passé le centre-ville. ” Avant, je vendais une propriété à Wépion en un week-end, se souvient Angela Detry, directrice de l’agence immobilière namuroise Finomat, qu’elle a fondée en 1982. Désormais, les transactions prennent plus de temps. ” Ceci dit, les tarifs wépionnais ne déméritent pas (trop) pour autant, se stabilisant dans une fourchette de 220.000 à 270.000 euros pour une maison trois chambres, estime le notaire Valentine Demblon.

Sous l’effet du retour généralisé à la ville, d’autres quartiers de Namur ont décollé ces dernières années, jusqu’à supplanter les anciens favoris. ” Une superbe propriété dans un magnifique cadre en portefeuille ne se vendra pas si elle n’est pas à proximité des grands axes et du centre-ville, dans un quartier disposant de toutes les facilités, assure la courtière. Les grands terrains n’ont plus la cote aujourd’hui, seuls comptent les mètres carrés habitables. “

Le réveil de la belle endormie

A entendre le promoteur namurois Paul de Sauvage (Actibel), si Namur rencontre un franc succès auprès des candidats-acquéreurs, c’est parce que la vie en son sein y a tout d’un conte de fées. ” Les gens viennent de partout pour profiter du cadre de vie agréable qu’offre Namur : sa citadelle, ses fleuves, son piétonnier, ses commerces, sa vie culturelle, son environnement vert, ses beaux villages alentour, etc. ” Mais, surtout, poursuit-il, son avenir plus radieux encore, boosté par une politique de grands travaux initiée depuis une dizaine d’années.

” Les Namurois dormaient sur un trésor et nous avons décidé de le faire fructifier, sans non plus tuer la poule aux oeufs d’or “, sourit l’échevin Arnaud Gavroy (Ecolo). Qui retrace le lent éveil de Namur, initié dans les années 1970 avec une première prise de conscience suite à la destruction du quartier du Grognon, au confluent de la Meuse et de la Sambre. Les chantiers de rénovation de la rue des Brasseurs et de création du piétonnier sont lancés dans la foulée et mettront une bonne vingtaine d’années à aboutir. Les années 1990 et 2000 connaissent leur lot de réussites, dont le développement de l’université ou encore la rénovation du théâtre. ” Mais l’étalement urbain se poursuit en parallèle, asphyxiant toujours plus Namur, déplore l’élu. La ville est alors duale, partagée entre son centre et sa périphérie, dépensant une fortune pour lier les deux extrêmes : entretien des routes, financement des transports en commun, etc. “

En 2006, les autorités communales décident d’y mettre un terme et planchent, dès 2009, sur un schéma de structure pour mieux stopper l’urbanisation effrénée et densifier les noyaux existants (le centre-ville et ses faubourgs). Au menu, une nouvelle gare multi-modale, une passerelle cyclo-piétonne, la requalification de quartiers dévalorisés (Bomel, etc.), la résolution des problèmes de mobilité, la réaffectation des chancres (quartier des Casernes, etc.)… ” Namur bénéficie d’un nouveau départ sans pour autant se départir de son étiquette de ville durable, conclut Arnaud Gavroy. C’est normal qu’elle attire puisqu’elle conjugue tous les atouts. “

Erpent, le nouvel Eldorado

Parmi les entités namuroises qui tirent désormais leur épingle du jeu figure en première ligne Erpent, perchée sur les hauteurs, au sud-est du centre-ville. Et en particulier le quartier de Géronsart, précise Angela Detry, où les maisons – exclusivement des quatre façades, Erpent ne comptant pas ou très peu de maisons mitoyennes – se monnaient près de 300.000 euros, parfois plus. ” C’est le cas si elles possèdent quatre à cinq chambres et s’étendent sur 150 m2, détaille la responsable de l’agence Finomat. Si elles atteignent 200 m2 habitables, leur prix monte jusqu’à 400.000 euros. ” Etant entendu que leur état général est bon, s’empresse-t-elle d’ajouter. Les petites maisons quatre façades construites il y a 20 ou 30 ans, à rénover, plafonnent, elles, à 220.000, voire 250.000 euros.

L’autre point fort d’Erpent, outre sa situation enviable, est la large quantité de promotions immobilières qui y essaiment, tant en matière de maisons que d’appartements. Dont coût, de l’ordre de 2.500 à 3.000 euros/m2. ” C’est à Erpent et à Jambes (située juste en dessous d’Erpent, face à Namur, sur la rive droite de la Meuse, Ndlr) que se situent les principales réserves foncières namuroises en cours d’urbanisation “, intervient Arnaud Gavroy en faisant référence au schéma de structure communal dont la Ville s’est dotée en 2009 pour cadrer son développement et, surtout, endiguer l’étalement urbain (lire l’encadré ” Le réveil de la belle endormie “). ” Il subsiste également des zones urbanisables à Wépion ou à Malonne, voisine, mais celles-ci ne seront pas ouvertes à l’exploitation avant bien longtemps, reprend l’échevin. D’autant que Jambes, Erpent, Bouge (au nord de Namur, le long de la E411, Ndlr) ou encore Belgrade (au nord-ouest, en direction de la N4) sont dans le périmètre d’agglomération de la Ville de Namur, ce qui autorise l’ouverture de nouvelles voiries. ”

Vue sur fleuve

Le succès de ces quartiers périphériques n’éclipse pas pour autant l’attrait du centre-ville namurois auprès des candidats-acquéreurs, quoique certaines zones y soient plus courues que d’autres. Le coeur historique de Namur – le piétonnier et ses abords – conserve ainsi son lot d’aficionados mais souffre de graves problèmes de mobilité. Le pourtour de ce que l’on appelle la ” corbeille ” namuroise est extrêmement congestionné aux heures de pointe, tandis que le parking est malaisé en son sein. Sans compter que l’état du bâti y est préoccupant. D’après le promoteur namurois Paul de Sauvage, qui a fait le calcul, un bâtiment sur trois est en mauvais état dans le centre-ville. ” Dans les 10 années qui viennent, il faudra dépenser 1,2 milliard d’euros pour la rénovation du bâti à Namur, estime-t-il. Soit de quoi générer 1.000 emplois. ” Et de plaider pour la mobilisation et le soutien des pouvoirs publics namurois à cet effet, à commencer par la réduction du coût des charges salariales pour les entreprises oeuvrant dans le secteur de la rénovation.

Les artères vertes et ombragées de la citadelle de Namur sont également fort recherchées, même si elles sont moins ” sélect ” que par le passé. ” Leur attrait est toujours vif, pour le calme et l’impression de campagne dans la ville qu’elles offrent, acquiesce le notaire Valentine Demblon. La vue sur le centre-ville est imprenable, les terrains sont beaux et grands et les prix variés : on peut démarrer sous les 300.000 euros et dépasser les 800.000 euros pour des propriétés d’exception. ” Un enthousiasme que partage moins la courtière Angela Detry. ” Le quartier de la citadelle est nettement moins couru qu’il y a 30 ans, surtout pour ses biens les plus cossus “, dit-elle.

Il y a par contre, en centre-ville, une zone à succès sur laquelle tous les observateurs du marché immobilier namurois s’accordent : les bords de fleuve. Les rives de la Meuse et de la Sambre sont peuplées d’immeubles à appartements ou de belles maisons de maître qui attisent l’intérêt d’un public de seniors et de familles aisées. Les promoteurs s’en donnent d’ailleurs à coeur joie, élevant nombre de résidences sur les rares terrains encore disponibles de part et d’autre de la Meuse, vers Bouge et Loyers.

Frédérique Masquelier

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