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“La guerre coûte cher… même lorsqu’elle est froide”

Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, afin d’aider des nations européennes et asiatiques exsangues et empêcher l’extension des régimes communistes, les Etats-Unis ont soutenu la demande mondiale, finançant les investissements, l’emploi et la consommation chez leurs alliés.

Cette politique a planté la graine des maux dont souffrent encore l’économie américaine aujourd’hui : un déficit jumeau (commercial et budgétaire) et un système économique basé davantage sur la consommation et l’endettement que sur l’épargne.

Pendant un temps, la chute du Mur et le déplacement de nombreux anciens pays de l’Europe de l’Est vers l’Union européenne a pu faire croire à l’apparition d’une nouvelle ère. Une croyance fallacieuse. Comme le rappelle le maître du Kremlin, Vladimir Poutine : ” la Russie n’a jamais perdu la Guerre froide, parce que la Guerre froide n’est pas terminée “.

Vladimir Poutine a raison : les relations entre Moscou et le camp occidental, qui s’étaient déjà fortement refroidies voici quatre ans à l’occasion du conflit ukrainien, ont subi une nouvelle baisse de température ces dernières semaines avec les expulsions réciproques de dizaines de diplomates et les frappes occidentales contre la Syrie, pays allié du Kremlin.

En un trimestre à peine, le monde s’est donc retrouvé baigné dans un vieux parfum de tension Est-Ouest, pas encore aussi épais que lors de la crise des missiles de Cuba, mais nous n’en sommes plus très loin : Vladimir Poutine a promis le ” chaos international ” si de nouvelle frappes occidentales devaient survenir. Et l’on peut penser que si la Russie n’était pas l’organisatrice de la Coupe du Monde de football cette année, le chaos frapperait déjà à nos portes.

Longtemps, on a considéré que la guerre – même froide – n’était finalement pas une si mauvaise chose, économiquement parlant. Pour un pur cynique, insensible aux considérations humanitaires ou simplement humaines, un conflit stimule l’investissement industriel, la recherche, l’innovation. Finalement, n’est-ce pas grâce à la Guerre froide que l’homme a pu marcher sur la Lune ?

On peut penser que si la Russie n’était pas l’organisatrice de la Coupe du Monde de football cette année, le chaos frapperait déjà à nos portes.

Mais cela, c’est la surface des choses. Car à bien y réfléchir, et tout en restant sur un plan purement économique, l’entrée des relations diplomatiques est-ouest dans une période de glaciation génère aussi son lot de conséquences funestes.

La résurgence d’une politique de blocs (et désormais, ils sont quatre : les Etats-Unis, l’Europe, la Chine et la Russie) va de pair avec un protectionnisme accru, une menace géopolitique sur certaines matières premières, une hausse des investissements publics non productifs (dans les missiles, par exemple) et une fragilisation des finances publiques déjà fortement affaiblies par la crise de 2008.

Ces événements surgissent en outre au mauvais moment, alors que nos économies semblent avoir atteint le sommet du cycle et s’engagent sur une pente descendante. Comme l’affirmait voici quelques jours la patronne du Fonds monétaire international, Christine Lagarde : ” Le tableau général est actuellement lumineux. Mais nous pouvons voir des nuages plus sombres pointer à l’horizon “. Elle voulait parler de l’essoufflement naturel des économies après plusieurs trimestres de croissance. En Europe, par exemple, le baromètre de l’activité future des industries, l’indice PMI des directeurs d’achats, accuse une baisse de 0,6 % entre décembre 2017 et janvier, puis de 0,8 % entre janvier et février…

Mais Christine Lagarde avait aussi en tête la menace de tensions politiques graves. ” Les nations sous-estiment presque toujours le coût économique d’une guerre “, écrivait l’économiste américain William Nordhaus qui a livré de longues études sur les coûts directs et surtout indirects des conflits depuis un siècle. C’est toujours vrai. Même lorsque la guerre est froide.

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