La politique commerciale de Donald Trump, une équation à beaucoup d’inconnues

. © Reuters

La politique commerciale résolument protectionniste des Etats-Unis, promesse électorale de Donald Trump, comporte de nombreux risques économiques et diplomatiques. Quelles sont les forces et les faiblesses d’une telle offensive?

– Pourquoi cette politique est-elle mise en place? –

Pendant sa campagne, le milliardaire républicain avait promis de faire passer “l’Amérique d’abord” et de dénoncer les accords commerciaux qu’il juge calamiteux et responsables de la destruction de milliers d’emplois américains. A l’approche des élections de mi-mandat le 6 novembre, M. Trump pourrait avoir envie de démontrer à ses partisans et ses électeurs qu’il tient ses promesses.

“Donald Trump n’est pas limité par l’establishment. Il continue de déconcerter les dirigeants étrangers mais si on revient sur ce qu’il a dit au cours de sa campagne et bien des années auparavant, aucune de ces mesures n’est surprenante, il fait précisément ce qu’il a dit qu’il ferait”, souligne Edward Alden, expert en commerce international au Council on Foreign Relations.

– Quelles sont ses forces? –

Les Etats-Unis accusent un déficit commercial, avec la Chine en particulier (plus de 375 milliards de dollars de déficit dans les échanges de marchandises avec Pékin en 2017).

Ils sont donc en mesure de taxer davantage de biens importés que ne peut le faire Pékin sur les produits américains entrant en Chine.

En 2017, Washington a exporté 130,4 milliards de dollars de marchandises vers le géant asiatique quand ce dernier a exporté 505,6 milliards de biens vers son partenaire américain.

– Quelles sont les inconnues? –

En annonçant des taxes douanières sur 50 milliards de dollars d’importations chinoises et en menaçant de nouvelles taxes sur potentiellement 400 milliards de dollars supplémentaires, Donald Trump teste une stratégie jusqu’au-boutiste inédite aux conséquences inconnues.

“Cela va être très difficile pour les deux parties de trouver un moyen de faire marche arrière et de diminuer ces tensions sans perdre la face”, observe Eswar Prasad, spécialiste de la Chine et professeur de politique commerciale à l’Université de Cornell, relevant la “rhétorique irrésistiblement hostile”.

Il estime toutefois qu’il y a toujours “un espoir” que les deux premières puissances économiques du monde “s’éloignent du précipice d’une guerre commerciale” étant donné le potentiel impact économique mais au prix d’un effort commun pour trouver un compromis.

– Quels sont les risques économiques ? –

Les taxes douanières des Etats-Unis de 25% sur 50 milliards de dollars d’importations chinoises et de 10% sur 200 milliards d’importations supplémentaires et les mesures de représailles du même acabit de Pékin pourrait réduire la croissance du Produit intérieur brut (PIB) de la Chine d’environ 0,3 point de pourcentage et celle des Etats-Unis d’environ 0,2 point de pourcentage, selon des estimations d’Oxford Economics.

“Il va être difficile pour les Etats-Unis d’identifier 200 milliards de dollars d’importations chinoises pour les soumettre à ces tarifs sans que cela ne pénalise les entreprises américaines et/ou les consommateurs”, commente Louis Kuijs, chef économiste en Asie pour Oxford Economics, soulignant que de nombreuses sociétés américaines sont parties prenantes dans les exportations chinoises vers les Etats-Unis.

C’est par exemple le cas des entreprises qui fournissent des composants électroniques pour le compte du groupe de télécommunications chinois ZTE.

L’hostilité commerciale grandissante entre Washington et Pékin inquiète aussi les marchés financiers et certains milieux industriels.

– Quel soutien ? –

Du monde des affaires en passant par les agriculteurs et les élus américains, la politique commerciale de Donald Trump suscite critiques et inquiétudes jusque dans le camp même des républicains.

L’élu Kevin Brady, à la tête d’une des plus puissantes commissions parlementaires au Congrès, s’est ainsi dit “inquiet” de l’impact négatif sur “les industriels, les agriculteurs, les travailleurs et les consommateurs américains”.

– Quels risques diplomatiques ? –

Dans sa quête d’une dénucléarisation de la Corée du Nord, Donald Trump a besoin du soutien de la Chine.

“Il souhaite avoir une relation personnelle avec le Président de la Corée du Nord (Kim Jong Un). Il a annoncé qu’il avait bien progressé sur ce plan. Et je pense qu’il estime ne pas avoir besoin de la Chine à ce stade”, analyse Edward Alden.

Pour autant mardi, le dirigeant nord-coréen s’est rendu en Chine, pour la troisième fois depuis mars. Il a évoqué avec son homologue chinois Xi Jinping son sommet historique avec le président américain Donald Trump, illustrant les efforts de la Chine pour jouer “un rôle constructif” dans le dossier nucléaire.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content