Transactions, hausse des prix… Pourquoi le risque de surchauffe pour la brique est bien réel

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Le marché immobilier en Belgique continue de bien performer, boosté par des taux toujours très bas et une machine du crédit hypothécaire qui tourne à plein régime. Jusqu’à inquiéter la BNB qui pourrait obliger les banques à prêter encore moins facilement.

A l’évidence, le marché immobilier en Belgique continue d’avoir le vent en poupe. L’an dernier, les notaires ont enregistré un nombre record de 341.170 transactions, contre 329.000 un an plus tôt (+ 3,7%). De leur côté, les banques ont continué à prêter aux ménages à un rythme élevé, ” s’affichant à 5,8 % en novembre, contre 5,6 % à la fin de 2017 “, souligne la Banque nationale (BNB) dans son dernier rapport annuel, sorti ces jours-ci. D’après les chiffres de l’Union professionnelle de crédit, elles ont accordé l’an dernier des nouveaux crédits hypothécaires pour un montant total de 34 milliards d’euros. Soit une croissance spectaculaire de 9,5% par rapport à 2017. Ici aussi, il s’agit d’une nouvelle année record. La cinquième d’affilée, selon BNP Paribas Fortis. La banque, qui octroie un crédit habitation sur quatre en Belgique, explique ces chiffres en croissance par une poursuite de la hausse des prix immobiliers, une demande soutenue, notamment par la réforme des droits d’enregistrement en Flandre (une baisse de 10 à 7 %), et bien sûr, des taux qui restent historiquement bas.

1. Les prix continuent de grimper

Comme le note la Banque nationale (BNB) dans son dernier rapport annuel, ” le renchérissement de l’immobilier s’est poursuivi en Belgique en 2018 “. Tant les appartements que les maisons se sont à nouveau appréciés. Selon les chiffres du Baromètre des notaires, le prix moyen d’une habitation a atteint 251.584 euros l’an dernier. Entre 2014 et 2018, ce prix moyen a même grimpé de 10,9%. Le prix des appartements a, quant à lui, atteint 220.095 euros l’an dernier, soit une progression de plus de 10% depuis 2014.

La BNB s’inquiète de l’endettement hypothécaire croissant des ménages, dépassant aujourd’hui les 230 milliards d’euros, soit 60,6% du PIB.

Même si ” les jeunes ont tendance à retarder quelque peu l’acte d’achat et à louer plus longtemps “, note CBC, la Belgique reste clairement un pays de propriétaires. Selon la banque, 65% des Belges se disent en effet aujourd’hui propriétaires. Résultat, le montant moyen emprunté par les Belges pour financer l’achat d’un bien a augmenté l’an dernier de 5% chez BNP Paribas Fortis, s’établissant à 166.576 euros.

2. Des taux qui restent très bas

Si le marché immobilier continue à aussi bien se comporter en Belgique, c’est parce que s’endetter pour financer un achat immobilier reste extrêmement bon marché. ” Le marché des crédits hypothécaires est aujourd’hui très concurrentiel avec des taux très bas et des marges très petites pour les banques, indique Keytrade Bank. La remontée des taux annoncée depuis des années n’a toujours pas lieu. ”

Même s’ils ne baissent plus, les taux hypothécaires restent en effet très bas et les prévisions de hausse sont limitées. La BNB observe un plancher historique pour les taux d’intérêt fixes à plus de 10 ans de 1,95% en novembre dernier. Il y a cinq ans, début 2014, il tournait encore autour des… 3,6% ! Ce niveau très bas des taux – proche de zéro si on tient compte de l’inflation – se traduit, au sein de la clientèle de BNP Paribas Fortis, par une durée d’emprunt moyenne de 227 mois (juste en dessous des 19 ans) et une mensualité moyenne qui s’est établie l’an dernier à 840 euros, contre 845 euros en 2017.

3. Retour en grâce des taux variables

Si le taux fixe continue de remporter l’adhésion des candidats à l’achat d’un bien, force est de constater que le taux variable a retrouvé grâce aux yeux des emprunteurs. La tendance s’observe clairement chez Belfius tandis que le pourcentage de crédits hypothécaires à taux variable a carrément doublé l’année dernière chez BNP Paribas Fortis. En 2018, 31% des emprunteurs ont opté pour cette formule, contre 15% en 2017. Motif ? ” La peur des clients de voir les taux remonter a disparu, indique Stéphanie De Bruyne, director product management & pricing chez BNP Paribas Fortis. Ils sont confiants dans la persistance de taux bas. La loi encadre aussi le taux variable qui ne peut pas plus que doubler sur la durée de l’emprunt. ”

C’est surtout le taux révisable à cinq ans qui s’est montré le plus populaire l’an dernier du côté des clients de la banque au logo vert. Parmi les crédits à taux fixe (69% du total), c’est le prêt de 16 à 20 ans qui reste le plus demandé.

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4. Les refinancements s’essoufflent

Après plusieurs années importantes, ” les refinancements ont largement reculé en 2018 “, observe pour sa part Sébastien Degand, responsable des crédits aux particuliers chez BNP Paribas Fortis. Sur l’ensemble de sa clientèle, la première banque du pays note un recul de 20% entre 2017 et 2018. Par contre, l’achat reste très populaire. Hors refinancements, plus d’un client sur deux chez BNP Paribas Fortis a signé un prêt hypothécaire pour acheter une habitation et un prêt sur cinq a été accordé à la rénovation. Belfius pointe à ce propos un montant moyen emprunté pour un prêt rénovation ordinaire de 17.423 euros. Particularité : plus d’un prêt rénovation sur trois accordé l’an dernier par la banque publique était un prêt rénovation vert destiné à améliorer l’efficacité énergétique ou la protection contre le vol ou l’incendie. En 2015, ce n’était qu’un sur huit.

5. Les baby-boomers très actifs

Soutenu par les taux bas, l’investis-sement immobilier a, depuis quelques années, particulièrement la cote, surtout auprès des plus de 55 ans, une population dont la proportion a bondi de 25% en six ans chez BNP Paribas Fortis. Soucieux d’investir pour leurs vieux jours, ces baby-boomers représentent désormais un crédit sur 10 octroyé par le leader du marché, amenant en général beaucoup de fonds propres (43% de la valeur du bien acheté), pour emprunter en moyenne 160.187 euros, via des crédits de courte durée (10 ans), qui ne mangent que 31% de leurs revenus. ” On voit que c’est une tendance qui se maintient d’année en année et qui s’explique principalement par une sorte de désintérêt des baby-boomers envers les placements qui, à leurs yeux, ne rapportent peut-être pas assez, indique Sébastien Degand. Ils préfèrent se tourner vers la brique, que ce soit à des fins récréatives ou locatives, voire les deux. Tout en maintenant un niveau de vie acceptable, ils voient au travers de l’immobilier un vecteur de rendement plus important que des placements traditionnels qui s’avèrent beaucoup plus aléatoires. ” Alors que le gouvernement a instauré l’an dernier une nouvelle taxe sur les comptes-titres de plus de 500.000 euros, la brique est en effet considérée par certains comme une vraie niche fiscale. A ceci près que si l’immobilier est protégé, il s’agit de l’une des dernières poches dans lesquelles il est possible d’aller puiser pour gonfler les recettes de l’Etat.

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6. La Banque nationale s’inquiète

La crise de 2008 a renforcé l’intérêt du Belge pour l’immobilier, c’est clair. Mais, ” depuis maintenant deux ans, le contexte régulatoire beaucoup plus strict pour les banques recommandé par la BCE, notamment en matière de norme LTV qui calcule le ratio entre le montant du crédit et la valeur de l’habitation, nous responsabilise dans notre rôle de banquier, indique Xavier Falla, directeur général du marché des particuliers chez CBC. Les Belges ne peuvent plus investir dans l’immobilier à tout prix comme par le passé en ne regardant que le taux et un simple calcul de la faisabilité du projet. L’équation est plus complexe et notre conseil en tant que banquier est de les encourager à attendre le bon moment, surtout dans un contexte où les taux resteraient encore bas “, dit le spécialiste de CBC.

Dans un marché immobilier caractérisé par d’importantes hausses de prix et un rythme de progression annuelle des crédits hypothécaires qui reste élevé, la BNB s’inquiète de l’endettement croissant des ménages, dépassant aujourd’hui les 230 milliards d’euros (soit 60,6% du PIB, contre 57,8%, en moyenne dans la zone euro). Pour éviter que les banques ne prêtent à des quotités trop élevées, la BNB a d’ailleurs mis en place plusieurs mesures, macro-prudentielles comme on dit dans le jargon, les obligeant à mettre davantage d’argent de côté pour couvrir les risques de mauvais crédits. Malgré ces mesures restrictives adoptées en 2018, la BNB constate que les banques continuent de prêter en masse, n’hésitant pas à recourir à des quotités élevées. ” Durant le premier semestre de 2018, plus de la moitié des nouveaux prêts hypothécaires ont affiché un ratio loan-to-value ( montant emprunté par rapport à la valeur du bien acheté, Ndlr) supérieur à 80 % “, lit-on dans le rapport annuel. L’an dernier, 25% des crédits hypothécaires accordés par BNP Paribas Fortis l’ont, par exemple, été aux moins de 30 ans. A ces millennials (qui disposent d’un portefeuille moins garni que les baby-boomers), BNP Paribas Fortis a prêté en moyenne 87% de la valeur de leur future habitation. C’est que pour combattre les taux bas et compenser des revenus qui se tassent, les banques font du volume. Quitte à être moins regardantes sur la qualité des emprunteurs ? Seule certitude, par la voix de son tout nouveau gouverneur, Pierre Wunsch, la Banque nationale avertit: elle pourrait serrer à nouveau la vis. C’est même quasiment certain dans la mesure où le nouveau ministre des Finances Alexander De Croo estime en effet que ” si la Banque nationale dit qu’un danger est en train de se créer, elle doit alors venir avec des mesures “. Et cela, même si les banques rétorquent en disant que leur portefeuille est sain, avec des défauts de paiement qui se limitent à moins de 1% de l’ensemble des prêts hypothécaires, avance Febelfin (la Fédération belge du secteur financier).

Transactions, hausse des prix... Pourquoi le risque de surchauffe pour la brique est bien réel

7. A quoi s’attendre pour 2019 ?

En fait de perspectives, les experts de BNP Paribas Fortis tablent sur une lente remontée de maximum 0,5% des taux longs pour l’année 2019. ” Plusieurs éléments sont de nature à soutenir une reprise des taux vers le haut, estime Sébastien Degand. Mais si celle-ci survient, elle devrait être modérée, voire très modérée, soit entre 20 points de base et au maximum 50 points de base pour les taux belges à 10 ans et étalée sur les 12 prochains mois. ” Un avis que partage Frank Maet, senior economist chez Belfius, pour qui ” les perspectives de croissance et d’inflation pour la Belgique et la zone euro restent provisoirement assez sobres, de sorte que l’on attend seulement une augmentation limitée des taux à long terme en 2019. En outre, la forte conjoncture sur le marché de l’emploi se traduira par une croissance plus soutenue des revenus des ménages au cours des prochains trimestres, ce qui, conjugué au contexte de taux favorable, doit constituer une base solide pour le marché résidentiel dans notre pays en 2019. ”

Les principales tendances 2018

227 mois

durée moyenne des prêts hypothécaires signés en 2018 chez BNP Paribas Fortis.

840 euros

mensualité moyenne.

76 %

quotité moyenne des emprunteurs chez BNP Paribas Fortis.

Digitalisation

Pour ceux qui n’ont ni le temps ni l’envie de passer par l’agence pour négocier leur taux, de plus en plus de banques proposent une offre digitale via PC, tablette ou smartphone. Offrant depuis plusieurs années la possibilité à ses clients de signer numériquement les documents liés à la souscription d’un crédit logement, KBC (et donc aussi CBC et KBC Brussels) assure depuis peu pouvoir répondre en 10 minutes à une demande de crédit hypothécaire en ligne et offrir au demandeur un taux personnalisé et compétitif (uniquement pour ses clients existants et salariés, et avec quotité limitée). Le taux offert est définitif et non négociable. Idem, et cela sans devoir être client, chez Keytrade et Hello bank ! . La filiale 100% digitale de BNP Paribas Fortis, qui avait innové en lançant début 2016 le premier prêt hypothécaire en ligne en Belgique, a convaincu l’an dernier 3.200 emprunteurs… connectés.

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