Philippe Donnay (Commissaire au plan): “En chiffrant les programmes électoraux, nous descendons dans l’arène politique”

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Le Bureau du Plan va évaluer l’impact des principales priorités des partis pour les élections du 26 mai.

D’ici le 31 janvier, les partis doivent vous remettre leurs priorités politiques et les mesures préconisées pour les atteindre, que le Bureau du Plan va chiffrer. Qu’est-ce que tout ce travail va apporter à la campagne ?

L’objectif est d’inciter les programmes à être plus réalistes. Maintenant, entre la liste des priorités que les partis nous remettront et ce qu’ils diront en campagne, il y aura peut-être de la marge. Mais, au moins, chacun pourra vérifier car nos projections seront mises en ligne sur un site dédicacé (ww.dc2019. be, avec un ” d ” pour ” doorrekening ” et un ” c ” pour ” chiffrage “). Ce travail en amont permet de voir plus facilement les points où les partis sont les plus compatibles. Aux Pays-Bas, le chiffrage préalable a beaucoup aidé à l’élaboration rapide du programme socio-économique du gouvernement, ce qui ne les a pas empêchés de se diviser sur des questions de société.

Prenons un exemple : le MR a déjà annoncé qu’il proposerait de porter la quotité exemptée d’impôts de 8.300 à 12.500 euros. Est-ce le genre de mesure que vous chiffrerez ?

Tout à fait. Notre analyse inclura les effets retour, notre modèle permettant d’évaluer l’impact sur les finances publiques, la croissance, l’emploi, l’environnement, la mobilité et même la distribution des revenus. Nous pourrons, par exemple, dire quelles catégories de revenus seront les plus impactées par telle ou telle mesure fiscale. Et si une mesure n’est pas totalement financée, nous le dirons. Ces données,

je pense, alimenteront utilement la campagne. Nous transmettrons aux partis nos analyses, mesure par mesure. Mais nous ne publierons que l’impact global car les mesures et les priorités interagissent, en tout cas certaines d’entre elles.

Quand l’idée d’un tel chiffrage a été mise sur la table, vous n’étiez pas un chaud partisan. Et aujourd’hui ?

Avec ce chiffrage, nous descendons dans l’arène politique. Quand nous estimons l’impact de mesures gouvernementales, nous fâchons déjà des ministres. Alors imaginez ici, en pleine campagne…

Le Bureau du Plan risque d’être une sorte de punching-ball. Aucun organisme indépendant n’aime jouer un tel rôle, c’est pourquoi j’étais réticent. Mais nous avons mené sept réunions avec les services d’études des partis pour bien définir ce que nous faisons ou ne faisons pas. Il y aura des allers-retours entre nos services et les partis, qui auront l’occasion d’ajuster leurs propositions en fonction de nos analyses. C’est finalement toute une nouvelle culture de l’évaluation qu’il faut apprendre. Ce travail a aussi du positif pour le Bureau. Cette nouvelle mission nous a poussés à revoir nos modèles de prévision. Et nous voyons déjà quelles améliorations nous devrons leur apporter, notamment la possibilité de décliner les impacts selon les Régions. Nous avons aussi dû veiller à rendre nos publications plus didactiques.

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