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Conjoncture: le cycle qui n’en était pas un?

Au-delà du fait que les marchés financiers sont devenus très nerveux ces dernières semaines, plus en raison d’une réappréciation de certains risques qu’en réaction à un choc majeur d’ailleurs, il faut reconnaître que les indicateurs économiques continuent de décevoir en ce moment.

La semaine dernière, la publication d’indicateurs PMI (qui mesurent la confiance des directeurs d’achat dans les différents secteurs de l’économie) en berne dans la zone euro tend à montrer que la décélération économique observée depuis le début de cette année se poursuit. En Belgique, outre le fait que le baromètre de conjoncture de la Banque nationale s’est replié en octobre, d’autres signes ne trompent pas. Par exemple, l’activité dans l’intérim continue de décélérer. Or, il s’agit d’un indicateur précurseur du marché du travail. Les créations d’emplois vont plus que probablement ralentir dans les prochains mois. L’évolution du nombre de chômeurs temporaires pour raison économique dit exactement la même chose.

Dans ce contexte, l’important est de savoir si l’on parle ici d’une décélération supplémentaire tout en conservant une croissance économique positive ou bien, si on doit déjà envisager une récession. Il y aurait beaucoup de choses à dire à ce sujet. A ce stade, dans l’état actuel de la situation conjoncturelle et politique en Europe, cela m’inspire deux commentaires.

N’enterrons pas trop vite la reprise. D’une part, l’évolution de la plupart des indicateurs conjoncturels est, certes, très moyenne en ce moment, mais il ne faut pas oublier que cela fait suite à des progressions qui, en 2017, paraissaient trop optimistes. Même après leur baisse depuis le début de l’année, les indicateurs de confiance restent à des niveaux élevés et compatibles avec une poursuite de la croissance économique. Par ailleurs, les entreprises de la zone euro continuent de vouloir investir, demandent des crédits (à des conditions qui restent très favorables) et ont besoin de grandir si l’on en croit les statistiques en la matière. C’est donc aller un peu vite en besogne que de verser dans le défaitisme à propos de la croissance future uniquement parce que les marchés financiers sont soudainement déprimés et parce que certains indicateurs pointent dans la mauvaise direction. Le président de la BCE, Mario Draghi, l’a encore vigoureusement rappelé la semaine dernière.

Même après leur baisse depuis le début de l’année, les indicateurs de confiance restent à des niveaux élevés.

D’autre part, nonobstant ce qui est écrit ci-dessus, on ne peut nier que l’évolution économique actuelle est décevante. Il faut y ajouter les trop nombreux risques actuels qui pourraient impacter le scénario des prochains mois. Dès lors, même si l’heure n’est pas encore à considérer une récession imminente, il est clair que les prévisions économiques n’ont pas fini d’être révisées à la baisse. Et si tout ceci était quand même les signes précurseurs de la fin de la partie positive du cycle économique, serait-ce grave ? La réponse est oui ! Parce que la configuration globale de l’économie de la zone euro est loin d’être le reflet d’un haut de cycle.

Au niveau de la croissance économique elle-même, il serait étonnant d’avoir eu une période d’accélération de la croissance aussi faible et aussi courte. Dès lors, au niveau du marché du travail, même si les taux de chômage sont toujours en baisse, on est encore loin du plein emploi ou même, dans certains cas, du niveau de taux de chômage que l’on connaissait juste avant la crise de 2008. Les finances publiques se sont, certes, améliorées mais on est, ici aussi, très loin du compte : la plupart des pays de la zone euro dégagent encore des déficits publics alors qu’a priori, la partie positive du cycle économique devrait être synonyme d’équilibre ou de surplus (on peut rêver…). Que dire alors de la politique monétaire, sachant qu’un premier relèvement de taux de la BCE n’est pas attendu avant…septembre ou octobre 2019 ? Pourrait-on imaginer un cycle économique où la partie positive du cycle…se termine au même niveau de taux qu’elle n’avait commencé ?

Du point de vue de la situation économique générale, il serait très malvenu que le cycle économique se termine dès à présent. Sans vouloir verser dans un pessimisme excessif ou des scénarios de fin du monde, je pense de plus en plus qu’une telle perspective demanderait urgemment de l’audace, pour éviter de verser dans l’extrémisme.

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