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“Le test peu concluant (pour l’instant) du revenu universel”

A la recherche d’un nouveau souffle pour leur économie, de nombreux gouvernements sont tentés par des mesures inédites. Le revenu universel est l’une d’entre elles. Ce n’est pas une nouvelle idée, à vrai dire. Elle circule depuis longtemps, du moins sur le plan théorique.

Jusqu’à présent, aucun pays n’a introduit un tel revenu inconditionnel. Par contre, des initiatives plus ou moins adroites sont lancées. Ainsi, l’Italie devrait introduire un revenu citoyen dès le mois d’avril. Ce revenu était la mesure phare du mouvement populiste 5 Etoiles, maintenant au pouvoir. Mais la réalité budgétaire et les exigences de la Ligue du Nord, son alliée au pouvoir, en ont éliminé la substance. D’une part, au lieu de réduire la bureaucratie, le revenu citoyen nécessite de nouvelles institutions pour examiner plus d’un million de dossiers afin de déterminer ceux qui y auront droit et dans quelle ampleur (le montant est variable en fonction de certains critères). D’autre part, le revenu est conditionné à la recherche d’un emploi, et le bénéficiaire ne peut refuser plus de trois propositions d’emplois en l’espace de 18 mois. Il s’agit donc davantage d’un revenu d’intégration conditionnel que d’un revenu universel.

Plus intelligente et réfléchie fut l’expérience menée en Finlande ces deux dernières années. Ce pays cogite en effet à l’évolution de son système de sécurité sociale, compte tenu des évolutions de la société mais aussi de l’automatisation de l’économie qui entraînera indubitablement des tensions sur le marché du travail. Pour tester le revenu universel, les services de sécurité sociale ont sélectionné par tirage au sort parmi les chômeurs (c’est important ! ) 2.000 personnes qui, pendant deux ans, ont reçu 560 euros de manière inconditionnelle. Ce montant correspond à l’allocation de chômage de base. L’idée d’un tel test grandeur nature est de comprendre les conséquences d’une telle mesure, les changements de comportement, les éventuels effets pervers, de manière à valider ou pas les hypothèses théoriques émises jusqu’à présent.

En Finlande, les personnes bénéficiant d’un revenu inconditionnel se sont révélées plus confiantes en elles-mêmes par rapport à leur recherche d’emploi. Il les pousserait à en accepter plus facilement un ou à créer leur propre activité.

A ce stade, des résultats préliminaires sont disponibles pour l’année 2017. Il semble que l’octroi d’un revenu inconditionnel ne modifie pas la probabilité que la personne trouve un emploi. Cela n’aide manifestement pas les chômeurs mais cela ne les pousse pas non plus à l’oisiveté. Par contre, cela améliore leur bien-être (mesuré sur différents éléments tels que la confiance en l’Etat, la confiance en son propre futur, etc.). Les personnes bénéficiant de ce revenu se sont aussi révélées plus confiantes en elles-mêmes par rapport à leur recherche d’emploi. Il les pousserait à en accepter plus facilement un ou à créer leur propre activité. Malgré l’absence d’effet sur le marché du travail en 2017, on peut donc y trouver un élément encourageant. Peut-être que les résultats de la deuxième année de test (attendus en 2020) révèleront que cette confiance s’est davantage concrétisée.

Par contre, il ne faut, semble-t-il, pas attendre grand-chose en matière d’économie bureaucratique. Le revenu inconditionnel étant limité au revenu de base, les personnes en bénéficiant peuvent toujours demander des compléments en fonction de leur situation familiale. On est loin de pouvoir faire l’économie des services de chômage, ce qui, pourtant, est un argument souvent avancé par les défenseurs du revenu inconditionnel.

Il faut souligner le fait que le groupe cible était entièrement composé de chômeurs. Or, les personnes sans emploi ne sont pas nécessairement celles dont la situation changera le plus en cas de revenu inconditionnel (faible de surcroît) car d’autres éléments interviennent, comme le manque de qualification. En revanche, certaines personnes ayant un emploi pourraient davantage modifier leur comportement en décidant de travailler moins si elles recevaient un revenu additionnel.

Il n’empêche que ce premier test à taille réelle ne semble pas aller dans le sens d’un changement drastique du dynamisme ou des structures de l’économie. D’ailleurs, le gouvernement finlandais semble abandonner cette voie pour le moment. Compte tenu des contraintes, du pour et du contre, se faire un avis reste difficile. Par contre, il faut souligner l’initiative des autorités finlandaises qui, plutôt que de parler dans le vent ou d’inventer des chiffres farfelus sur le coût, les bienfaits ou les ” subsides ” économisés par telle ou telle mesure, ont testé objectivement leur propos avec un encadrement académique. Ne serait- ce pas là une méthode à suivre en Belgique ?

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