Tim Cook, le patron d’Apple, aux prises avec l’héritage de Steve Jobs

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Ces dernières années, Tim Cook a perfectionné la gigantesque machine à sous qu’est Apple. Mais l’avertissement sur résultats de début janvier resème le doute chez les investisseurs : le CEO d’Apple peut-il sortir de son chapeau de nouveaux produits à succès à l’instar de son prédécesseur Steve Jobs ?

Dix ans après la percée de l’iPhone, Apple fait face à la rançon de ce succès. Début janvier, Tim Cook a dû annoncer que le chiffre d’affaires escompté pour le trimestre en cours était inférieur de 7 milliards de dollars aux prévisions. La raison principale : une baisse des ventes de l’iPhone, qui représente la majeure partie des 265 milliards de dollars de chiffre d’affaires annuel. Les derniers modèles sont en effet bien moins prisés que prévu, principalement en Chine.

La stagnation du marché des smartphones constitue un problème mondial pour tous les fabricants, mais les répercussions sont lourdes pour Apple en Chine. Si l’entreprise à la pomme reste populaire dans l’Empire du Milieu, les jeunes et la classe moyenne un peu moins aisée ne considèrent plus l’iPhone comme un must-have. Ils voient en effet suffisamment d’alternatives chez Huawei et d’autres marques chinoises. Et contrairement aux États-Unis, où Apple domine le marché des smartphones, les utilisateurs chinois sont moins attachés aux applications et au système d’exploitation d’Apple. En Chine, le service d’appel et de messagerie WeChat est devenu une super appli que les Chinois utilisent pour organiser leur vie, des réseaux sociaux aux rendez-vous médicaux en passant par les paiements. Il leur permet de déplacer leur vie numérique plus facilement vers un autre type de smartphone, ce qui les rend beaucoup moins fidèles aux marques de téléphones que les Occidentaux.

Des doutes surgissent

Il est peu probable que la position de Tim Cook à la tête de l’entreprise soit mise en danger dans les mois à venir. Il jouit d’une grande confiance grâce au succès fabuleux de ces dernières années. Il a perfectionné le business model d’Apple et, en 2018, la valeur boursière a même franchi le seuil psychologique des 100 milliards de dollars. Pourtant, les doutes émis lors de sa nomination définitive au poste de CEO refont surface. Lorsque Steve Jobs est décédé d’un cancer du pancréas en 2011, la relève assurée par Tim Cook n’a surpris personne. En effet, il avait déjà assuré l’intérim pendant le long arrêt-maladie de Jobs. Pourtant, aux yeux du grand public, c’est ce dernier qui est resté le vrai visionnaire à l’origine d’une série de produits à succès, de l’iMac à l’iPod et de l’iPhone à l’iPad. Or, c’est injustifié car Tim Cook est tout autant l’architecte de cette réussite.

Les audits imposés par Tim Cook aux fournisseurs sont décrits comme “aussi désagréables qu’un long examen de la prostate

C’est en 1998 qu’il rejoint Apple, alors au bord de la faillite. “D’un point de vue rationnel, je devais rester chez Compaq”, a déclaré Tim Cook dans un discours en 2010. “Mais après un entretien unique avec Steve, mon instinct m’a dicté de faire le grand saut.” Tim Cook est alors engagé pour mettre en place une nouvelle chaîne de production. Les usines propres de l’entreprise sont fermées et remplacées principalement par des sous-traitants asiatiques, ce qui rend la production d’Apple plus flexible. Selon Tim Cook, l’électronique est aussi périssable que les produits laitiers et les stocks doivent donc être réduits au minimum. Ses généreuses marges, Apple les doit à l’expertise opérationnelle et au sens du perfectionnisme de Tim Cook. Dans un portrait publié par le quotidien économique et financier Financial Times, les audits imposés par Tim Cook aux fournisseurs sont décrits comme “aussi désagréables qu’un long examen de la prostate”.

Un autre style

Chez Apple, Tim Cook place également la barre très haut. Pour le management, la semaine de travail commence par une conférence téléphonique le dimanche. Le style managérial du CEO contraste avec celui de son prédécesseur. Renforcer la concurrence interne au point que les collaborateurs en arrivent à se haïr et intimider le personnel avec ses accès de colère ne posaient aucun problème à Jobs. Cook recherche davantage le consensus et, pour exprimer son mécontentement en réunion, il fixe son interlocuteur et garde le silence.

Il exerce aussi son rôle de CEO d’Apple différemment dans d’autres domaines. Il a ainsi instauré des dividendes et investi davantage dans des oeuvres de bienfaisance, deux choses dont Steve Jobs ne voyait pas l’utilité. Et il ne se prive pas de faire de temps à autre une déclaration politique. Il s’est ainsi prononcé ouvertement contre la politique commerciale et migratoire du président américain Donald Trump. En 2014, il est également devenu le premier CEO d’une grande entreprise américaine à déclarer ouvertement son homosexualité. Très attaché à sa vie privée, Tim Cook a voulu, à travers son coming-out, soutenir les défenseurs de l’égalité de traitement des lesbigays.

Mais en affaires, il est difficile pour lui de sortir de l’ombre de l’iPhone et de Steve Jobs. Bien que les montres intelligentes, les écouteurs sans fil et les services comme Apple Music aient du succès, aucun de ces produits ne peut se mesurer actuellement à l’iPhone en termes de chiffre d’affaires.

Tim Cook (58 ans)

Poste : CEO d’Apple

Loisirs : fitness et fan de football américain

Traduction : virginie·dupont·sprl

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